Vous arrive-t-il de vous demander si vous connaissez vraiment votre entourage? Si ces gens sont réellement tels que vous les percevez, ou croyez les connaître? Et que savent-ils de vous, au-delà de ce que vous voulez bien leur partager, au-delà de votre capacité à exprimer tout ce que vous êtes?
Et puis, d’abord, qu’est-ce que « connaître » quelqu’un? Est-ce être témoin des événements marquants de son existence, deviner ses peurs, ses joies et ses peines dans un geste maladroit, un regard baissé, ou est-ce simplement se voir à travers l’autre, si bien que l’on se sent en terrain connu?
Cela me fascine de constater, à mesure que les années s’empilent, à quel point chacun est rempli de mystère; surtout ces gens que nous disons connaître. Ma mère est-elle en tous points ce que je vois d’elle? Ou se dessine-t-elle ainsi à mon regard pour se protéger, d’un instinct animal, de toute forme de reproche qui oserait franchir la barrière du langage? Et ma meilleure amie, celle avec qui je partage le confort des souvenirs, qui est-elle, derrière son rire d’enfant, et son refus d’être prise en photo? Je ne sais rien d’elle.
Pas plus que je ne connais ma grand-mère, et les secrets qui alourdissaient chacun de ses pas et de ses silences. Je ne sais rien de son chagrin d’avoir donné naissance hors mariage, et d’avoir dû laisser d’autres mains, et d’autres bras câliner sa petite fille. Je ne sais pas où voguait son esprit alors que j’étais si jeune et que j’ignorais encore tout du drame qui se jouait dans le cœur des gens.
J’ignore tout d’une cousine qui a tenté l’impossible pour sauver sa peau du cancer qui la menaçait de mort à chaque nouveau jour. J’ignore tout de son fils, de qui émane une lumière impossible à décrire. Je ne sais rien de ma propre sœur, que j’ai tenté de porter sur mon dos durant sa longue traversée du désert. Que sait-elle de moi?
Que savez-vous de mes luttes intérieures? De mes ambitions secrètes?
Je ne sais rien de vous, et vous ne savez rien de moi. Nous avons encore tout à apprendre de l’autre.
C’est bien vrai, j’ai découvert avec le temps des choses sur ma mère, j’ai compris certains de ses comportements parfois des années après. Personne en effet ne peut savoir quels sont les tumultes qui s’agitent en chacun de nous. D’autant plus que comme le dit une phrase que j’ai lue récemment : ‘Ma personnalité dépend de qui je suis mais mon attitude dépend de qui vous êtes’. Nous portons un masque différent selon nos interlocuteurs, alors où se manifeste le vrai moi ?
À mi-chemin entre ce que nous savons et ce que nous ignorons de nous-mêmes, peut-être?
Nul ne se connais et ne peut dire qu’il connaît l’autre, les mystères restent et l’inconnue dans le connu. Xxxx
Est-ce que ça signifie qu’on ait tous la même profondeur d’âme? Qu’on livre tous nos combats, peu importe ce qui se dégage de nous de l’extérieur? Car il me semble que certains essaient de dissimuler qui ils sont… ou n’ont tout simplement pas une connaissance d’eux-mêmes qui nous enrichisse à leur contact. Mais qu’en est-il lorsqu’ils sont aussi seuls qu’on puisse l’être, face à eux-mêmes? Je me pose ces questions car si nous sommes tous égaux, faits de noirceur et de lumière, de connaissance de soi et d’inconnu aussi, il sera toujours, toujours inutile de nous juger l’un l’autre. S’il est vrai que nous sommes tous faits de mystère, alors l’on doit respect à cette part d’ombre, et c’est au coeur qu’il faut parler.
Grosses bises, ma cousine que j’aime et que je connais trop peu… xxxx