L’an dernier, une production américaine a laissé des entailles profondes dans ma foi en l’humanité, renforçant mes convictions féministes plus que jamais : The stoning of Soraya M (La lapidation de Soraya M). Suite au visionnement du film, je suis restée plusieurs semaines dans l’incompréhension, secouée par une terrible révolte intérieure, brûlée vive par un sentiment d’impuissance sans précédent. Encore aujourd’hui, à la seule vue de ces images, je frôle la catastrophe.
Film choc de Cyrus Nowrasteh présenté pour la première fois en 2008, The stoning of Soraya M raconte l’histoire véritable de Soraya Manutchehri, mère de famille Iranienne condamnée en 1986 à la mort par lapidation après avoir été injustement accusée d’adultère par son mari (lequel souhaitait se remarier avec une jeune fille sans être tenu de subvenir aux besoins de deux épouses).
Victime d’une conspiration orchestrée par son mari et les hommes de son village, Soraya fut donc enterrée jusqu’à la taille, puis lapidée par son père, ses deux fils, son mari, et toute une horde d’enragés gagnés par la folie sanguinaire du meurtre. Son corps fut ensuite laissé aux chiens, sur le bord d’une rivière. Elle n’avait que 35 ans.
Production d’un réalisme troublant mais combien nécessaire, The stoning of Soraya M soulève la question du sort terrible réservé aux femmes dans certains coins reculés du monde où la charia (loi islamique) est encore appliquée. Car le cauchemar de Soraya n’est que la pointe d’un iceberg qui doit être exposé à tout prix.
Bien que la sentence de lapidation ne soit pas réservée qu’aux femmes (en 2009, un Somalien de 48 ans fut condamné à être lapidé en public après avoir été jugé coupable d’infidélité, et il en va de même pour les hommes coupables de sodomie), l’écrasante majorité des victimes de crimes d’honneur sont des femmes.
Les crimes d’honneur sont des actes de violence, le plus souvent des meurtres, commis par les membres masculins d’une famille à l’encontre de ses membres féminins, lorsqu’ils sont perçus comme cause de déshonneur pour la famille tout entière. Une femme peut être la cible d’individus au sein de sa propre famille pour des motifs divers, comprenant : le refus de participer à un mariage arrangé, le refus des faveurs sexuelles, la tentative de divorce — que ce soit dans le cadre de la violence conjugale exercée par son mari ou dans un contexte avéré d’adultère. La simple interprétation selon laquelle son comportement a « déshonoré » sa famille est suffisante pour enclencher une représaille. – Human Rights Watch
L’ONU estime que 5 000 femmes sont victimes de crimes d’honneur chaque année (or, selon la majorité des organisations qui observent le phénomène, ce chiffre serait en réalité trois à quatre fois supérieur) : mutilations génitales, lapidation, châtiment public, immolation, viol et mutilations à l’acide ne sont que quelques-uns des moyens employés par les familles pour regagner le respect de leur communauté.
L’histoire de Gul Meena
Ce qu’a dû traverser Gul Meena, adolescente pakistanaise de 17 ans, pour échapper aux assauts d’un mari violent de presque 50 ans son aîné, est d’une horreur indescriptible. Et pourtant, son histoire n’en est qu’une parmi des milliers.
Son cauchemar débute à l’âge de 12 ans, alors qu’elle est mariée de force à un homme sans pitié, qui pourrait être son grand-père, et qui la bat avec une brutalité extrême. Lorsque la jeune fille tente de trouver du réconfort auprès de ses parents, eux aussi la battent, sous prétexte qu’elle appartient à la maison de son mari, et qu’elle ne doit pas se plaindre.
Après cinq ans de sévices, elle rencontre un jeune Afghan, Qari Zakir, et trouve le courage de quitter son mari. Ils fuient ensemble à Jalalabad, en Afghanistan, en novembre 2012. Gul Meena sait alors qu’elle commet l’irréparable. Elle se doute qu’elle provoquera la colère de sa famille, mais n’a aucune idée de ce qui l’attend.
Son grand frère la traque jusqu’en Afghanistan. Armé d’une hache, il assassine le compagnon de Gul Meena, avant de frapper sa sœur 15 fois, la défigurant et la laissant pour morte, baignant dans une marre de sang.
Trouvée par un lointain parent de Qari Zakir, le jeune Afghan de qui elle était amoureuse, Gul est emmenée à l’hôpital, où elle est opérée d’urgence, souffrant d’affreuses blessures à la tête et au visage. La jeune fille conserve aujourd’hui des cicatrices, qu’elle considère honteuses. « Chaque fois que je me vois dans un miroir, j’ai terriblement honte. J’aurais préféré mourir. » Vivant dans un refuge pour femmes en Afghanistan, reniée par sa famille, défigurée et en deuil de son jeune amoureux, Gul Meena vit un calvaire que nous avons peine à imaginer.
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Un tiers des femmes autour du monde sont victimes de violence physique ou sexuelle, à un moment ou un autre de leur vie. Est-ce là affirmer que la question du bien-fondé du féminisme soit déconcertante tout autant qu’irrecevable? Le féminisme, cette lutte solidaire menée en majorité par les femmes, et pour les femmes, est le seul espoir possible pour les millions de Soraya et Gul, qui verront à leur tour leurs droits piétinés, et leur vie détruite.
Le féminisme actuel doit absolument évoluer vers une philosophie englobante, s’étendant bien au-delà des frontières de nos pays dits « civilisés ». Car tant qu’il y aura des femmes lapidées, mutilées, battues au nom de l’honneur, le combat sera toujours crucial et justifié. C’est ce que nous devons insuffler aux jeunes générations de femmes qui prennent d’assaut les universités et le marché du travail comme si le monde leur appartenait. Elle doivent, coûte que coûte, comprendre qu’en matière de droits et d’égalité, il n’y a jamais rien d’acquis. Et que leur diplôme universitaire ne signifie pas que nous puissions, mondialement, crier victoire.
Des larmes pour elles.
Et la rage au ventre.
Vaste sujet que celui de la condition humaine, un peu de beauté parfois, mais au milieu de tant d’horreur.
Chaque fois que je suis devant cette réalité, je me pose la question : De quoi sont-elles victimes ? Et là s’enchaînent les réponses, beaucoup de réponses qui me sont comme une échelle qui tombe vers le fond d’un puits noir comme une nuit sans étoile, et puis le vertige…
Victimes d’être nées femmes, dans un monde encore majoritairement dominé par des hommes imbus d’eux-mêmes, haineux, cruels et sadiques.
Oui certainement, victimes de la violence des hommes en premier lieu, mais encore, à ta connaissance, n’y a t-il pas de femmes qui jettent aussi leurs pierres ?
Victimes encore de l’interprétation des textes religieux, sinon des textes eux-mêmes, une interprétation masculine probablement, mais jusqu’à quel point les femmes partagent-elles ces dogmes, cette vision du monde et de la vie?
Voila un petit échantillon de questions que je me pose.
Bien à toi.
Dans ces pays, je crains qu’une femme surveillée en tout temps par les hommes de sa famille et de sa communauté, n’ait pas l’occasion (ni le courage suicidaire) de s’armer d’une pierre.
Il en est tout autrement dans de nombreux pays comme le Canada, j’en conviens.
Quant à leur lecture des textes religieux, elle prend ancrage dans une tradition millénaire qu’il ne leur est pas simple de remettre en question. Mais si les femmes s’avèrent complices de leur propre sort? J’ai bien du mal à le concevoir.
Sans doute la femme devra se libérer d’elle-même pour parvenir à se libérer de l’homme….
Merci pour ces mots échangés.
Oui, je le crois. Ça prendra une révolution. Les femmes devront se lever, s’armer et crier BASTA! ENOUGH! NOUS VOULONS ÊTRE LIBRES!
J’aimerais que cela se produise de mon vivant.
Merci à vous de prendre le temps de partager et de débattre. 🙂
Je me pose la question de l’amour dans tout ça…Il n’y aurait donc aucun lien d’amour dans ces familles-là, celles qui décident de lapider une sœur, une mère ? Comment peut-on en arriver là ? Un acte de barbarie contre un criminel, j’ai déjà du mal à la concevoir mais quelqu’un de sa propre famille ? Vraiment, je ne comprends pas. Parfois je me demande vraiment ce que je fous là, sur Terre…
C’est plus que difficile à comprendre… Les femmes sont malheureusement complices (de la même manière qu’elles le sont pour l’excision de leurs filles et leurs soeurs) de la violence générée contre elles. Je crois que fondamentalement, l’être humain se plaît à détester et haïr. Sinon, pourquoi tant de haine?
Je viens de voir ce film sur Netflix. N’allez pas penser que cela ne peut arriver en Europe ou en Amérique. L’islam ordonne la lapidation et, comme le disent si bien nos politiciens, l’islam fait partie de l’Europe et de l’Amérique. Allez, bon courage à nos futures générations, nous faisons entrer le loup dans la bergerie.
La violence détient de nombreux visages. Mais la cause qui se terre souvent au milieu de celle-ci n’est pas liée uniquement à des dénominations de nature religieuse, mais aussi politique. Les grands «saigneurs» et argentiers de notre planète savent manipuler (un empire demeure un empire, peu importe ses méthodes) de différentes manières.
Concernant l’islam, il y a depuis longtemps l’influence sioniste/franc-maçonne des Rothschild (et autres banquiers) qui maîtrisent les stratégies de division/de polarisation.. Pourquoi est-ce qu’ISIS ne s’attaque pas à Israel, déjà? La réponse est plus simple qu’on ne voudrait le voir. Mais l’impact de ces magouilles et de cette duperie ne fait que diminuer notre sens critique. Et ça fonctionne TRÈS BIEN. Mettre tout le monde dans le même sac et l’étamper «terroriste» pour légitimer toute la violence faite aux habitants du croissant fertile. Fausses-bannières. La répétiion et le jeu des associations. «Oui, mais…. Les musulmans sont des mordus de l’excision! »… -Ah bon? Ouach! C’est n’importe quoi.. Les tabarnacs! Je leur scalperais la face! Et en Afrique aussi? «Oui, c’est terrible! »
Euh… Pas nécessairement. En Afrique, il s’agit de torture sexuelle barbare propre à certaines régions…qui sont aussi de confession chrétienne! Ça n’excuse rien du tout…. Mais il est difficile de faire la part des choses, puisque souvent le média messager est financé par celui qui gagne à ce qu’on légitimise une violence froide, assis derrière un panneau de pitons, dans un cockpit ou sur un touchscreen. 1-On crée le problème 2- on génère une réaction 3- On offre la solution. Les médias sont les pasteurs de nos instincts et nos pensées. Et ils ont des liens TRÈS serrés avec les marchands d’armes. Voyons donc!.. «Cesse de croire tout ce que tu lis…..» Ah! Voilà. C’est pourquoi je ne m’informe plus par ces canaux d’informations.. C’est souvent de la foutaise, quand aux poltiques étrangères.
Celà dit, bien que j’abhore de tout mon être toute la violence faite aux femmes (notamment), peu importe le lieu où elle se trouve, nous devons tous aussi réfléchir à l’objectif caché derrière la multitude «d’informations» voulant nous faire fléchir à l’instinct premier: «il est arabe,il est noir, il mérite la mort.» C’est rendu trop simple de vouloir tuer pour éviter que quelqu’un tue. Ça ne tourne pas rond. Il y a de grandes sources de violence systémique, ici et ailleurs. Comme on dit: Follow the money and………… holy shit !
“C’est bien ça le drame du monde, trop d’information tue l’information, trop d’injustice réduit notre capacité à nous révolter.”