René et moi, on se disait « tu ». On se croisait lors d’un anniversaire, d’un souper de Noël ou d’un décès, et l’on prenait toujours le temps d’échanger, comme deux amis heureux de se retrouver.
René avait 91 ans. J’en ai 56 de moins. Mais René et moi, on se disait « tu ».
Il était un homme profond, droit et sincère, qui s’adressait à vous non pas par politesse mais par intérêt véritable, avec un respect entier de l’être humain qui se trouvait devant lui. Si vous aviez besoin d’un ami, il était là, prêt à vous entourer de sa présence toute simple et de vous éclairer de son sourire moqueur, prêt aussi à vous tapoter l’épaule ou la main en signe de compassion et d’encouragement.
René, il ne mâchait pas ses mots. Alors que je lui confiais m’être fait avorter, il m’avait surpris avec un high five et y était allé d’un « Bravo! Mets-toi pas dans’ marde ma p’tite fille. » et nous avions discuté des femmes, de religion et de l’importance de se faire une bonne vie. Peu importe où la conversation nous menait, elle se terminait sur une note positive, avec le sourire complice de deux enfants qui observent le monde, fascinés et intrépides.
Mon ami René, il osait avoir des idées qui dérangent. « L’Église catholique prenait les femmes pour des bêtes de somme. Voyons donc, c’est pas humain pour une femme de mettre au monde 14 enfants. De toute façon, des enfants, t’es mieux d’en avoir un ou deux, mais de t’en occuper comme il faut. » Il avait un raisonnement et un gros bon sens imperturbables. Le courage de ses convictions. Et il s’indignait avec grande force.
Je le respectais immensément.
Il était un être lucide et vibrant qui avait su reconnaître ces qualités en moi. Alors René et moi, on se disait « tu » pour mieux se regarder sans le filtre des années.
Merci René de m’avoir accompagnée au moment où j’avais besoin d’un complice. Ta finesse et ton humanité sont ancrées en moi comme des vérités immuables.
Au revoir mon ami.
Très belles éloges et tout à fait lui. À René xxx
Merci ma cousine, je t’adore! À René xoxox
Allo! moi aussi je t’adore. Xoxo
Mes sympathies.. Respect à ces femmes et ces hommes qui défient la pensée unique de leur époque tout en gardant la lucidité d’un amour profond.
Oh oui. Respect, bien au-delà des mots. Merci. La lucidité t’es toi-même pas tellement étrangère. Savoir de quoi on parle, ça aussi, ça se perd…